Antonio BELLUCCI, "L'Amour jaloux de la Fidélité"

(Pieve di Soligo, 1654 – Venise, 1726)

L'Amour jaloux de la Fidélité

Vers 1705-1710
Huile sur toile.
Hauteur 114 cm. Largeur 161 cm.
Historique : Ancienne collection Lacaze. Achat de la Ville, 1829.

La peinture présente dans un clair-obscur une nymphe et Vénus nue à qui l’Amour présente un lévrier tenu en laisse. Voulant témoigner de l’affection à sa maîtresse, le chien a renversé l’enfant dans sa précipitation. La déesse est allongée sur un grand drapé rouge. Elle occupe ainsi la majeure partie de la composition dont l’angle gauche laisse apprécier un lointain paysage montagneux.
Attribuant ce tableau à Sebastiano Ricci, le marquis de Lacaze lui avait donné le titre de Vénus caressant le chien d’Adonis qu’un Amour tient en laisse. Revenu à Bellucci après une étude de Carlo Donzelli en 1957, cette image sensuelle voire érotique et ambiguë dissimule un message moralisateur que le peintre vénitien chérissait.
Les artistes italiens et bellifontains de la Renaissance avaient aimé représenter la nudité de Vénus, seule ou avec Cupidon, Mars ou Adonis. Le lévrier rappelle certes qu’Adonis est mort en chassant un sanglier, mais il revêt plutôt une dimension allégorique théorisés par les traités d’iconologie, notamment celui de Cesare Ripa (v. 1555-1622) : il symbolise la Fidélité.
Bellucci s’inscrit dans la tradition vénitienne de ces grands nus féminins que Giorgione (v. 1477-1510) et Titien (v. 1490-1576) se sont plu à peindre, tout en revenant à un canon plus naturaliste, mis en valeur par ce ténébrisme caractéristique de la première génération de l’école vénitienne des Lumières. S’appuyant sur un clair-obscur caractéristique de la première génération des « ténébristes » vénitiens, il donne des caractéristiques similaires à une autre Vénus accompagnée d’amours (Liverpool, Walker Art Gallery), à Omphale (v.1698, Venise, Ca’Rezzonico), à Diane et à Danaë (Rome, palais Monteciterio ; 1700-1705, Budapest, Szépmûvészeti Múzeum).
Graveur et peintre, Antonio Bellucci fut formé aux effets de lumières contrastés par son maître Antonio Zanchi (1631-1722) dans la tradition de Luca Giordano (1632-1705). Après avoir exercé à Venise (fresques mythologiques au Palasso Sturm de Bassano, 1705) et à Vérone (Joseph et la femme de Putiphar, Castel Vecchio), il fut appelé en 1709 à la cour de Vienne auprès de Joseph Ier, puis de Charles VI avant de se rendre à Londres entre 1716 et 1722.
L’Amour jaloux de la Fidélité semble dater de la fin de la vie de Bellucci dans les premières décennies du 18ème siècle. Cette œuvre bordelaise est la seule toile avérée du peintre au sein des collections publiques françaises.
 

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Image de "L'Amour jaloux de la fidélité"© Musée des Beaux-Arts-mairie de Bordeaux. Cliché L. Gauthier

"L'Amour jaloux de la fidélité"© Musée des Beaux-Arts-mairie de Bordeaux. Cliché L. Gauthier